Sur le plan économique, l’économie marocaine s’est retrouvée partiellement à l’arrêt avec d’importants coûts économiques à couvrir. L’impact de cette crise se caractérise sur trois niveaux : du côté de l’offre, où les chaines de valeurs nationales sont retrouvent fortement ralenties, voire à l’arrêt dans certains secteurs, d’où la faillite de plusieurs TPME ; au niveau de la demande, où sont enregistrés un nombre important de pertes d’emplois, ce qui engendre un recul de la consommation nationale ; et enfin la suspension des chaînes de valeurs internationales entraîne un recul de la demande internationale adressée aux produits marocains mais également, sur le plan financier, un recul des IDE, des transferts courants et des recettes du tourisme, pesant sur les réserves internationales. Face à cette situation, une récession semble inévitable ! A cet effet, l’état a rapidement mis en place un Comité de Veille Economique afin de répondre aux premiers défis économiques liés à cette crise.
Dès le début de la crise, a été créé un « Fonds spécial pour la gestion de la pandémie du coronavirus », doté de plus de l’équivalent de 3% du PIB national, et alimenté via la contribution de différentes entités publiques et privées, en guise de mécanisme de mutualisation des risques. La mise en commun de ces moyens a permis d’agir sur les différents secteurs sans tenir compte des différences d’impact ou de contribution, puisque le fait de délaisser un seul secteur représenterait une menace pour la stabilité des autres secteurs par effet domino.
L’ensemble des actions entreprises vise à amortir ce choc multidimensionnel qui touche à la fois l’offre et la demande, aussi bien sur le marché national que sur le marché international. Ainsi, les aides apportés aux ménages vulnérables et aux entreprises permettraient de minimiser l’impact de la pandémie sur l’économie nationale et de réduire au maximum la récession.
Pour soutenir la demande, où plus du tiers des salariés affiliés à la CNSS ont été déclarés en arrêt d’activité par leurs employeurs, les autorités ont puisé dans les ressources du fonds COVID-19 pour indemniser les travailleurs du secteur formel à l’arrêt. Chaque salarié, en arrêt temporaire de travail, recevra une indemnité forfaitaire de 2000 dirhams en complément des allocations familiales et de l’AMO. La deuxième mesure vise les ménages faisant face à des échéances de crédit. Ainsi, a été acté le report d’échéance des crédits à la consommation et des crédits immobiliers contractés par les ménages, jusqu'au 30 juin 2020. Pour les travailleurs du secteur informel, qui vivent le plus souvent dans des situations précaires, il a été décidé aux ménages inscrits au registre du RAMED de bénéficier d’une somme de 800 à 1200 DH pour faire face à ce choc. Les non inscrits au RAMED pourront également bénéficier d’une aide équivalente, sauf que cette opération prendra plus de temps, du fait de la collecte des données et l’identification des ménages éligibles à ce financement.
Idem pour appuyer l’offre, l’état a entamé un ensemble d’actions pour limiter l’impact du COVID-19 sur les entreprises marocaines, qui se retrouvent face à des difficultés de trésorerie et dont un grand nombre est en cessation d’activité. Ces mesures s’articulent autour de : un report du paiement des cotisations sociales pour les mois de mars au mois de juin sans pénalité, une mise en place d’un moratoire sur les crédits bancaires jusqu’au 30 juin 2020 sans pénalités, et l’établissement du produit « Damane Oxygène » par la Caisse Centrale de Garantie destiné aux TPME dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas les 200 millions de dirhams et aux entreprises intermédiaires dont le CA est compris entre 200 et 500 millions de dirhams. Des mesures d’incitations fiscales en faveur des entreprises ont également été mises en place, dans le même souci de continuité de l’activité productive et de lissage du choc économique. Ainsi, la TGR a acté le report des échéances fiscales pour les entreprises dont le CA est inférieur à 20 millions de dirhams, du 31 mars au 30 juin 2020. Ce report porte sur les déclarations du résultat fiscal ainsi que sur les compléments d’IS dus au titre de l’exercice 2019 et le 1er acompte provisionnel exigible pour l’exercice en cours. Les entreprises ne remplissant pas le critère du CA peuvent s’adresser au Ministère de l'Economie, des Finances et de la Réforme de l'Administration (MEFRA) pour un traitement au cas par cas de leurs demandes. Par ailleurs, les contrôles fiscaux et l’exécution des avis aux tiers- détenteurs ont été suspendus jusqu’au 30 juin 2020. Enfin, le MEFRA a appelé à la régularisation de tous les arriérés de paiement au profit des TPE et PME.
Par ailleurs, le choc externe réside de premier abord en la dégradation, voire le gel, des Investissements Directs Etrangers (IDE) (liés à nos principaux pourvoyeurs, en l’occurrence : Zone Euro et pays du Golfe), des transferts courants (principalement les transferts courants des MRE) et des recettes du tourisme (un secteur qui génère 7% de la richesse nationale). Face à cette situation, les autorités cherchent à consolider ses stocks de réserves de change afin de pouvoir éponger une partie de l’aggravation du déficit courant mais aussi de prendre le relais du marché des changes, si le taux de change venait à atteindre la nouvelle limite de -5% à la dépréciation. En réponse à cette situation extrêmement compliquée, le parlement a voté le dépassement du seuil d’endettement externe fixé dans la loi des finances de 2020 à hauteur de 31 milliards de dirhams. Par ailleurs, le pays a débloqué la ligne de précaution et de liquidité qu’il avait auprès du Fonds monétaire international, à hauteur de 3 milliards de dollars et a tiré sur une ligne de crédit contractée auprès de la Banque Mondiale en décembre pour le financement des politiques de développement et des catastrophes naturelles pour un montant s’élevant à 275 millions de dollars. L’administration des douanes a appelé à réduire les importations de voiture au maximum via un courrier adressé à l’association des importations de véhicules au Maroc, dans le but de réduire la pression sur les réserves de changes afin de les utiliser pour les nécessités. Encore, le MEFRA et Bank Al Maghrib ont annoncé le passage à la deuxième phase de flexibilité du régime de change par l’élargissement des bandes de fluctuation dans un intervalle de +/-5%. Cette mesure vise à limiter l’impact du choc externe du COVID19 sur les réserves de change du Royaume.
Concernant la politique monétaire, la Banque Centrale a apporté une réponse économique de taille en injectant massivement des liquidités afin de soutenir le crédit bancaire, et donc les ménages et les entreprises. La baisse du taux directeur a pour objectif d’augmenter le niveau de liquidité des banques et d’en répercuter la baisse sur les taux débiteurs appliqués aux secteurs non financiers et aux ménages (une baisse du taux directeur de 25 points de base à 2%).